La charge pesant sur les infirmières est d’autant plus lourde qu’elles doivent aussi défendre les blessés les armes à la main si besoin. Une balle fasciste brûla l’épaule de Zina. Il y a dans cette préoccupation une dimension militaro-sanitaire évidente : éviter les grossesses ou les maladies vénériennes, s’assurer que les recrues restent aptes à servir. La question du nom s’est posée pour la « docteure Lida » après celle de l’uniforme inadapté, car « la vareuse m’arrivait aux genoux et les bottes étaient d’une pointure telle que je ne pouvais marcher avec ». Dans le cas soviétique, ces discussions sur l’usage des ressortissants d’Asie centrale ou du Caucase et sur la mobilisation des femmes ont lieu en même temps. Armée Rouge Croix Rouge Arrière Grand Père 2nd Guerre Mondiale Femme Russe Femmes Guerrières Histoire Du Monde Histoire Militaire La Grande Guerre Female lieutenant in Medical Services, 1944-45 Female lieutenant in Medical Services of the Soviet army, 1944-45. La politique soviétique à l’issue de la Seconde Guerre mondiale illustre la réflexion de Luc Capdevila. Additional storage beyond this allotment is $0.02/GiB. Parue en 1934, la nouvelle « Dans la ville de Berditchev » est portée à l’écran en 1967 par Askoldov sous le titre La Commissaire ; Askoldov y intègre le thème du génocide juif et le film ne sera autorisé en URSS qu’à la fin des années 1980. Je vois un blessé allongé à côté de la mitrailleuse, et son coéquipier en train de tirer, ‘d’arroser’, comme nous disions. 53, delo 14, list 32). Norman Naimark, The Russians In Germany. Plus que l’expérience vécue par les femmes, pour lesquelles les sources restent parcellaires et marquées par leur condition de recueil, , c’est la politique de mobilisation de l’État et la manière dont celui-ci recrute, intègre puis démobilise les femmes qui nous intéresseront ici. Finalement on a décidé de me conférer le titre de docteur Lida. 7, delo 5, list 5. The Militarization of Women’s Life, Boston, South End Press, 1983, p. 150 sqq. John Erickson, « Soviet women at War », in J. Garrard, C. Garrard (dir. Anna Krylova, Soviet Women in Combat. Love, Sex, Duty and Sexual Harassment in the Ranks of the Red Army 1941-1945 », The Journal of Power Institutions in Post-Soviet Societies, n° 17, 2016. Voir : Irène Eulriet, « Le recrutement des femmes dans les forces armées des États membres de l’Union Européenne : entre contrainte et mutation », in C. Weber (dir. Pendant la guerre elle-même, les femmes sont conscientes de ce phénomène et en parlent. On serait tenté, en effet, de voir chez les femmes qui s’engagent dans l’armée une volonté de remettre en cause les rapports de genres. Elle trouva la mort au combat en Prusse-Orientale, le 28 janvier 1945. Dès la Première Guerre mondiale, des infirmières sont présentes sur les différents fronts, la question pour l’institution militaire étant alors surtout de contrôler ces services relevant le plus souvent d’initiatives charitables ou privées. Jean-Marc . Sur la formation femmes soviétiques dans années 1930 voir : Anna Krylova, Soviet Women in Combat. Ce que j’ai pu moi-même observer sur trois secteurs du front »52. Comme l’écrit Laurent Gayer, « il faut éviter de projeter des conceptions féministes de la libération des femmes […] sur l’expérience de ces femmes », La tendance à lire leur expérience sous l’angle de la défense des droits existe néanmoins. Les femmes combattantes peuvent aussi percevoir leur engagement comme un mal nécessaire, à un moment où les hommes ne sont plus capables d’assurer leur rôle traditionnel de défenseur. Intervention de la camarade Melnik, aviatrice d’un régiment féminin, devant le président de l’URSS Kalinine le 26 juillet 1945 (« Beseda tovarisha Kalinina s devushkami voinami, steogramma »), RGASPI, fond M1, op. Ensuite, ils sont partis. La plupart des ordres du Ministère de la défense et du Comité d’État pour la Défense a été publié dans des recueils ou est disponible en ligne ici et ici. L’intervention des autorités politico-militaires dans les relations hommes-femmes au sein d’un groupe armé est une constante quel que soit le contexte, tant dans les armées institutionnalisées que les rébellions armées. Les hommes de ces nationalités sont ici considérés comme des combattants « de second ordre », appelés à être utilisés, comme le seul régiment d’infanterie de femmes jamais créé. ), Penser la violence des femmes, Paris, La Découverte, 2012, p. 37. Je n'y manquerai pas même si mon blog n'est plus très actif ces derniers mois ... rolland zampilli Stéphane Audoin-Rouzeau, « Armées et guerres : une brèche au cœur du modèle viril ? Belles femmes russes et merveilleuse filles russes histoire passionnante: Nationale - Rouges - Symbole - Soviétiques - Femme - Chapeau - badge - Russe - insigne - Armée - Faucille - syndicat - Étoiles - La mode - USSR - Rétro - Le pouvoir - La culture - Uniformes - Modèle - L'Histoire - communisme - Marteler - L'Armée … Très peu de femmes ont pu continuer à servir dans l’aviation militaire, et si avant-guerre on les décourageait d’étudier dans les académies militaires, elles s’en voient tout simplement barrer l’accès après le conflit79. Iakov Vas’kovskii, Iuri Novikov, My – chapaevtsy. Rapport Ultra Secret de la responsable du Département des Travailleuses et Paysannes du Comité Central du VKP(b) à tous les responsables dans les Républiques, 2 mars 1929 : TsDAGO, fond 1, Op. J’entends quelqu’un me crier : ‘Infirmière, vient faire un pansement !’. Elle renforce en effet le mariage officiel au détriment du « mariage civil » (le concubinage qui jusque-là avait la même valeur juridique), et permet que l’État prenne en charge plus facilement les pensions alimentaires pour les enfants nés hors-mariage dont les pères seraient défaillants80. Euridice Charon Cardona, Roger D. Markwick, « Our brigade will not be sent to the front : Soviet Women under Arms in the Great Fatherland War, 1941-45 ». « Materialy soveshchaniia devushek-partizanok, sostoiavshego v TsK VLKSM 19-19 ianvaria 1944 goda », RGASPI, fond M1, op. Liouba Vinogradova
Alors que de nombreuses femmes sont restées seules dans le village, Vaskov a beaucoup de mal à faire régner la discipline et réclame inlassablement à ses supérieurs qu’on lui envoie des soldats qui ne boivent pas et ne s’intéressent pas aux filles. ), Femmes en guerres, Bruxelles, Éditions de l’Université de Bruxelles, 2011, p. 17. Historical and Contemporary Perspectives, Westport (CT), Greenwood Press, 1982, p. 30. ), Penser la violence des femmes, Paris, La Découverte, 2012. « Grandes Guerres. Certaines de ces adaptations sont faites sur le terrain, au cas par cas, d’autres sont décidées de manière centralisée : ainsi un décret d’août 1942 autorise à délivrer aux femmes qui ne fument pas 200 grammes de chocolat ou 300 g de bonbons par mois à la place du tabac42 ; un décret d’avril 1943, prévoit la distribution de 100 g supplémentaires de savon pour les femmes. Laurent Gayer, « Liberation and containment : The Ambivalent Empowerment of Sikh Female fighters », Pôle Sud, n° 36, 2012, p. 49-65. Cette ouvrière dans une usine textile se porte volontaire dès le début de la guerre, et sert d’abord comme infirmière avant d’apprendre à tirer à la mitrailleuse. « Des eunuques, ou quoi ? Dans leurs souvenirs, les officiers et soldats soviétiques qui ont défendu Sébastopol en 1941-1942 évoquent souvent la figure de Nina Onilova. Catherine Merridale, « Masculinity at war : Did gender matter in the Soviet Army ? 26/08/2014 17:20, femmes russes ), Les Femmes militaires, Rennes, PUR, 2015, p. 44. Dokumental’naia povest’ o 25-oi Chapaevskoi strelkovoi divizii, Moscou, DOSAAF, 1968. Le film a-t-il influencé ces vétérans soviétiques au point qu’ils plaquent sur leurs souvenirs de guerre des images du film ? Françoise Thébaud, « Penser les guerres du XXe siècle à partir des femmes et du genre. C’est ce que souligne Vera Artamonova, formée à l’école Centrale des femmes snipers de Moscou, qui se remémore sa guerre sur le front de Kaliningrad en 1944 : Nous n’étions pas toujours des snipers. Cette référence m’a été communiquée par Brandon Schechter. Salopes en uniformes !’ ». C’est vous qui donnez la vie, et personne ne chérit autant que vous la paix, la tranquillité et la vie sur terre ! Reculant, elle s’appuya sur le mur du bâtiment et tira ses dernières balles. Quentin Deluermoz, « Des communardes sur les barricades ». Catherine Merridale, « Masculinity at war : Did gender matter in the Soviet Army ? Au contraire, quasiment partout les bouleversements liés à la guerre entraînent ensuite une crispation autour du partage des rôles traditionnels, un renvoi des femmes à leur fonction maternelle et un effacement de leur expérience de guerre. Les chercheurs opposés à l’accès des femmes au combat soulignent que les femmes n’ont, à taille égale, que 80 % de la force physique des hommes59, et que morphologiquement la force de la partie supérieure de leur corps sera toujours moindre. Historical and Contemporary Perspectives, Westport (CT), Greenwood Press, 1982, p. 221. Plusieurs autres paramètres entrent en ligne de compte, dont le niveau d’éducation (l’usage des armes antiaériennes suppose un niveau d’éducation minimum que le seul recrutement d’hommes n’aurait pas forcément permis de satisfaire) ou encore l’âge. Ensuite, ils sont partis. ), Pamiat’ o voine 60 let spustia : Rossiia, Germaniia, Evropa, Moscou, NLO, 2005. Égalité, sexe et violence », Critique internationale, n° 60, 2013, p. 9-19. Histoire, Femmes et Sociétés, n° 12, 2000. Love, Sex, Duty and Sexual Harassment in the Ranks of the Red Army 1941-1945 », The Journal of Power Institutions in Post-Soviet Societies, n° 17, 2016 ; Marta Havryshko, « Illegitimate sexual practices in the OUN underground and UPA in Western Ukraine in the 1940s and 1950s », The Journal of Power Institutions in Post-Soviet Societies, n° 17, 2016. 1914-1945, Paris, Pygmalion, 2010. Maintenant que je suis rentrée j’ai essayé de tirer ma petite sœur comme ça, je n’ai pas réussi, pas une fois, À l’approche d’un village, un soldat fut grièvement blessé par des éclats de mine. Si, au-delà de la diversité géographique et historique, des parallèles peuvent être tracés entre les différentes politiques envers les femmes en temps de guerre, c’est bien que la dimension du genre constitue une entrée pertinente. Jason Morton, « Fighting for a Role : The Lives of Anka-Pulemetchitsa », BPS Working Papers Series, 2015. Aleksandra Shliakhova est tuée le 6 octobre 1944 et il n’est pas jusqu’à l’inscription sur sa tombe qui mélange masculin et féminin : « Ici est enterré le célèbre sniper, adjudant de la garde Shliakhova Aleksandra Nikolaevna […] Elle est tombée en héros dans les batailles pour la Patrie Soviétique ». Reste que « si celles-ci représentent 3 % des effectifs qualifiés de combattants, elles sont absentes du véritable noyau dur : infanterie, chars, unités de reconnaissance ». The Problem ». Adrienne M. Harris, « Memorializations of a martyr and her mutilated bodies : public monuments to Soviet war hero Zoya Kosmodemyanskaya, 1942 to the present », Journal of War and Culture Studies, vol. La particularité soviétique réside plutôt dans le fait que les femmes ont accès aux missions de combat. Maria Botchkareva, Yashka. Pas de bandes, pas d’endroit où se laver. De même, le retour des femmes à la sphère privé est quasi-unanimement analysé comme un « retour en arrière » alors qu’il peut correspondre au contraire non seulement à des aspirations personnelles, mais aussi à une stratégie d’ascension sociale, à une volonté d’échapper aux difficultés du monde du travail92. Ainsi dans la rébellion Huk aux Philippines, les hommes (et les hommes uniquement) pouvaient demander en raison de leurs « besoins physiologiques » à prendre une seconde « femme de la forêt » aussi longtemps qu’ils étaient dans le maquis, à condition que leur femme officielle soit au courant et qu’ils ne restent pas bigames après la fin de la guerre45. ), World War II and the Soviet People, New-York, St Martin’s Press, 2002, p. 51. Par exemple « à la fin de la Seconde Guerre mondiale, seulement trois des 3 000 femmes employées à l’usine de la Canadian Car and Foundry ont conservé leur emploi », . Salopes en uniformes !’ ». Le « a » marque la féminisation du nom de famille en russe. Sur la veste est brodée à la main des fils.. Tout d’abord en raison de leur position majoritairement subordonnée : les femmes dépassent rarement le grade de sous-officier, et il n’y a quasiment aucune femme parmi les officiers supérieurs. 1, delo 998, list 3-4. Il y a donc là une réponse à une nouvelle forme de guerre, au danger des bombardements aériens qui transforment le cœur des villes auparavant hors d’atteinte en cibles potentielles. L’expérience des, Les Salvadoriennes et la guerre civile révolutionnaire, National Femininity Used and Contested : Women’s Participation in the Nationalist Underground in Western Ukraine during the 1940s-50s, Ukaz Prezidiuma Verkhovnogo Soveta SSSR ot 25 sentiabria 1945 goda o demobilizatsii vtoroi ocheredi lichnogo sostava Krasnoi Armii, Pamiat o voine i massovaia identichnost Rossiian, Illegitimate sexual practices in the OUN underground and UPA in Western Ukraine in the 1940s and 1950s, Girls’ and ‘Women’. Luc Capdevila, François Rouquet, Fabrice Virgili, Danièle Voldman, Sexe, genre et guerres (France, 1914-1945), Paris, Payot, 2010, p. 224. Luc Capdevila, « La mobilisation des femmes dans la France combattante (1940-1945) », Clio. ), Histoire de la virilité. Le plan adopté suit les différentes étapes chronologiques, de l’entrée en guerre à la période post-conflit, et rappelle d’abord que la mobilisation des femmes obéit le plus souvent à une logique de remplacement des hommes. A History of Violence on the Eastern Front, Cambridge, Cambridge University Press, 2010 ; Olga Nikonova, « Soviet Amazons : Women Patriots During Prewar Stalinism », Minerva. John Erickson, « Soviet Women at War », in J. Garrard, C. Garrard (dir. The base rate of a Spaces subscription is $5/month and gives you the ability to create multiple Spaces. Oleg Budnitskii, « Muzhchiny i zhenshchiny v Krasnoi Armii (1941-1945) », Cahiers du monde russe, vol. Mais je lui ai déclaré que dans ce cas-là, nous étions égaux, bien que je n’étais que caporal et lui lieutenant. En russe, comme dans toutes les langues qui marquent une différence entre le masculin et le féminin, se pose par exemple la question des grades et des formules militaires. La hiérarchie militaire russe n’a pas hérité du grade de Generál-Polkóvnik du régime impérial mais de l’Armée rouge. Lettre de la sergent-chef Nata Netiazhuk au président du CC du Komsomol Mikhailov : RGASPI, fond M1, op. IN MEMORIAM. 17 juin 2018 - Découvrez le tableau "Roza Shanina - Шанина, Роза Егоровна" de Ludovic Saint-martin sur Pinterest. 47, delo 103, list 1-3. Certains représentants du parti ou de l’armée estiment, eux, préférable de fermer les yeux47. Lætitia Bucaille, « Femmes à la guerre. Ainsi, la citation de la tireuse d’élite Aleksandra Shliakhova à l’ordre du Drapeau Rouge le 31 janvier 1944 pose que « Le sergent Shliakhova31 est décoré de l’Ordre du Drapeau Rouge pour exécution exemplaire de mission militaire », mais un certificat médical de janvier 1944 atteste qu’elle a été « blessée au combat, autorisée à quitter l’hôpital près rétablissement »32. , et que morphologiquement la force de la partie supérieure de leur corps sera toujours moindre. Les femmes combattantes peuvent aussi percevoir leur engagement comme un mal nécessaire, à un moment où les hommes ne sont plus capables d’assurer leur rôle traditionnel de défenseur. The Militarization of Women’s Life, Boston, South End Press, 1983. Françoise Thébaud, « Résistances et Libérations », Clio. Il est visible dans le maintien de l’interdiction de l’avortement (qui ne sera autorisé qu’en 1955) et dans l’adoption d’une loi sur la famille en 1944. La situation est un peu différente pour l’URSS, où le taux de femmes actives était déjà élevé avant la Seconde Guerre mondiale : en 1940, les femmes représentaient 39 % de la force de travail soviétique. Les jupes, quand elles sont délivrées, permettent difficilement de courir ou de ramper dans la boue ou la neige ; ce n’est qu’à titre expérimental que les femmes de la brigade d’infanterie féminine de Moscou se voient délivrer des pantalons spéciaux, munis d’une bande de tissu détachable entre les jambes au lieu d’une braguette36. L’intégration des femmes oblige l’institution militaire à des ajustements qui révèlent à quel point ce qui est perçu comme « neutre » (les questions sanitaires, les uniformes, le langage) est en réalité masculin. Face à cette animosité, les femmes en viennent à passer sous silence leur expérience : « la première année, lorsque je suis rentrée de la guerre, je parlais, parlais. Ces fonctions – tout aussi importantes dans le cas soviétique que dans le cas français évoqué par Françoise Thébaud – ne sont cependant quasiment jamais mentionnées. Laurent Gayer, « Liberation and containment : The Ambivalent Empowerment of Sikh Female fighters », Pôle Sud, n° 36, 2012, p. 63. Les témoignages sont d’ailleurs innombrables sur les uniformes inadaptés, pantalons trop grands, vareuses arrivant à mi-cuisses. Dyan Mazurana, Linda Eckeborn Cole, « Women, Girls and Disarmament, Demobilization and Reintegration », in C. Cohn, Women and Wars, Cambridge, Polity Press, 2013, p. 194-214. Ou est-ce au contraire le film, sorti en 1934, qui a inspiré l’action de Nina Onilova lorsqu’elle s’est retrouvée une mitrailleuse à la main ?